Monday, March 7, 2016

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rolles volcaniques en activité.
De petite taille et courtaud, le submersible, appelé Y Astragale, avait la forme d'un têtard à queue raccourcie. A Lavant, le poste de pilotage était si exigu que le tableau électronique où aboutissaient plusieurs centaines de connexions se trouvait à une dizaine de centimètres à peine de la tête du pilote.
Pour accéder à sa place. O'Donnel avait été obligé d’exécuter une série de mouvements patiemment étudiés. D'abord.
il devait faufiler sa jambe gauche entre le siège et la carlingue. Le pied venait s’encastrer sur le pédalier servant à corriger l'assiette. Ensuite, le pied droit suivi du bassin passait par dessus le siège dont le dossier était rabattu, en évitant avec soin le panneau de contrôle. Le pied venait buter sur la pédale commandant les hydrojets. La force de gravité aidant, le pilote devait se laisser tomber sur le siège ayant au préalable relevé le dossier avec la main droite, car de la gauche, il était obligé de se tenir à la poignée située au plafond afin de conserver l'équilibre. O'Donnel exécuta cette manoeuvre avec l'aisance et la synchronisation dues à une longue habitude.
Derrière le poste de pilotage. Y Astragale disposait de deux sièges, situés dos à dos face aux hublots latéraux, juste sous l'écoutille d'accès. Dans la partie inférieure, située dans le ventre de ce têtard difforme, se trouvaient deux compartiments auxquels on accédait par une courte échelle métallique. Le premier était une soute aux dimensions réduites avec un banc et un râtelier où étaient suspendues trois tenues de plongée, avec bouteilles d'air comprimé, masques et palmes. Le compartiment annexe était un sas étanche, ce qui permettait aux passagers d'effectuer des missions à l'extérieur. Le sas était si petit qu'on était obligé de s'y accroupir en position foetale.
Des ampoules à faible tension baignaient Y Astragale d'une lumière vert pâle, laissant des zones d'ombre dans les recoins. Quand les yeux s’habituaient à cette clarté parcimonieuse, la visibilité extérieure s'en trouvait nettement améliorée.
Y'Astragale filait six noeuds à quelques mètres du fond sous-marin. L’hydro-jet situé à l'arrière était orientable, ce qui conférait au submersible une grande maniabilité. A l'avant et au dessus du poste de pilotage, un projecteur articulé et couplé à une caméra transmettait sur les deux écrans de contrôle une vision périphérique de leur environnement immédiat.
Dans le premier écran, à l'instar d'un récepteur de télévision, la caméra donnait une image en couleurs dont la netteté dépendait pour beaucoup de la transparence de l'eau. Dans le second, l'image était synthétisée, modifiée et corrigée par l'ordinateur qui traitait les informations transmises par le sonar actif. Une bonne dizaine de kilomètres du relief sous-marin se découpait sur l'écran en trois dimensions.
O'Donnel avait placé à dessein Liam sur le siège bâbord, où se trouvait l'écran tridimensionnel. Irbit jouait le rôle d'observateur, ce qui lui convenait parfaitement, car son regard était captivé par le paysage extraordinaire qui défilait sur l’écran.
Skinny corrigea le cap avec son palonnier et Y Astragale orienta sa course perpendiculairement à la côte. Sur le moniteur de Liam. en bas et à droite de l'image tridimensionnelle, un affichage alphanumérique donnait à chaque instant la distance qui les séparait de la terre ferme. Quand Liam regarda à nouveau, il constata qu'ils se trouvaient déjà à moins de six cent mètres de la falaise côtière.
Jetez un coup d'oeil à votre écran, Liam, fit le pilote qui venait de réduire la vitesse de Y Astragale à trois noeuds. Dites- moi ce que vous voyez.
L'Irlandais constata que, dans son moniteur, la falaise côtière formait une coupure très nette avec la plateforme continentale.
Je distingue assez bien la terre ferme, dit calmement l'archéologue. Nous sommes à cinq cent soixante mètres.
Parfait, approuva le pilote, visiblement satisfait. Vous allez manoeuvrer le levier situé en bas de votre écran, vous ne pouvez pas vous tromper. Il est enrobé de caoutchouc... Vous l'avez trouvé ?
Oui. je l'ai, répondit Liam en saisissant la commande entre le pouce et l'index.
Ce levier sert à orienter l’inclinaison du sonar vers le haut, le bas, la droite et la gauche. Sa fonction est la même que celle d'une manette dans les jeux vidéo. Vous y êtes ? Allons-y ! Tirez- la très doucement vers le bas, avec délicatesse, compris ?
Liam exécuta le mouvement, et la majeure partie de la falaise côtière disparut de l'écran. Elle fut remplacée par une vue tridimensionnelle du fond sous-marin beaucoup plus détaillée qu'auparavant.
Avez-vous le fond sur l'écran ? La voix du pilote s’était élevée d'un ton.
Je l’ai net et clair, confirma Liam.
Alors ne touchez plus à rien ! ordonna O'Donnel. Comment est le fond ?
Liam analysa les données de son moniteur et constata que l’uniformité du sol n'était qu'apparente. A une centaine de mètres de Y Astragale, le sol était jonché de concrétions rocheuses d'un aspect chaotique.
Je crois que nous sommes près d'un éboulement, répondit Liam, qui avait marqué une hésitation.
Ok, c’est bon. Vous avez un bouton noir à droite de votre écran. Le mot "zoom” est gravé dessus. Pressez-le. Nous allons étudier cet “éboulement” de plus près.
Quand Liam appuya sur le zoom, l’écran se remplit d'un amalgame disparate de formes et de volumes.
Je ne vois qu'un fouillis inextricable, s’exclama-t-il.
Détendez-vous, Liam. ne soyez pas si pressé. Il faut laisser le temps à l'ordinateur de traiter convenablement les données. Le résultat s'affichera sur votre écran dans quelques secondes.
Le pilote modifia imperceptiblement le cap de Y Astragale de façon à venir droit sur les formations rocheuses. Comme il l’avait prédit, l'image se figea sur le moniteur un instant plus tard.
Sainte Mère de Dieu ! cria Liam, essayant de dominer son enthousiasme.
Skinny répondit à l'exclamation de l’archéologue par un éclat de rire. Irbit, surprise elle aussi, se retourna et s’assit à califourchon sur son siège pour pouvoir regarder par dessus l’épaule de son compagnon.
La voix du pilote retentit dans l'habitacle avec un accent triomphant.
Assez étonnant, n’est-ce pas ? Est-ce que vous avez une idée de ce que vous avez sous les yeux ?
La réponse de Liam ne vint pas tout de suite. Son index parcourait les formes rectilignes apparues sur l’écran, suivant leur contour, comme s’il avait voulu vérifier l’énormité de sa découverte par le toucher.
On n'a pas besoin d’avoir fait de longues études d'archéologie pour comprendre ça ! finit-il par dire en retrouvant sa voix pondérée. L'image tridimensionnelle est extraordinairement claire.
Effectivement, le fond sous-marin apparaissait jonché d'un vaste nombre d'éléments architecturaux, certains debout, d'autres couchés, dont la régularité de forme dénotait une origine incontestablement humaine.
Maintenant, appuyez sur le bouton marqué “couplage". 11 est à gauche de l’écran. En l’activant, le téléobjectif de notre caméra prendra le relais. Vous pourrez passer à loisir de l’image en temps réel à celle traitée par l’ordinateur pour comparer les formes et tester vos conclusions. Je vais manoeuvrer le projecteur pour mieux vous éclairer cette portion de terrain.
Quand Liam exécuta cette opération, l'image du moniteur confirma ses conclusions précédentes. Il fut contraint de s’avouer que Y Astragale s'approchait lentement de ce qui avait dû être dans un lointain passé une cité prospère.
Est-ce que je peux manoeuvrer le levier d’orientation de la caméra ? demanda Liam. Je voudrais élargir son champ.
Il est à vous, Liam. Allez-y comme vous l’entendez, r

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pléter ses explications.
Croyez-vous que Cheik Yoran aurait englouti des sommes si faramineuses si ses calculs préalables n'avaient prouvé avec une certitude absolue la rentabilité de notre procédé ? Je vous donne un seul chiffre pour terminer, car nous arrivons à la station. L’énergie que nous allons récupérer avec nos capteurs provient du frottement perpétuel des couches thermoclines de la mer et des mouvements tectoniques. Elle aura un coût trois fois inférieur à celui de l'énergie traditionnelle produite en surface. Songez un instant à l’effet de notre procédé dans l'économie mondiale. C’est comme si le prix du pétrole chutait d'un coup de baguette magique de
vingt dollars le baril à sept...
Ce serait la déprime du marché, ou peut-être un Crash 1 répondit Liam vivement.
Exactement, confirma le pilote. Un choc pétrolier, mais à l'envers. O'Donnel fit une courte pause et sourit vaguement avant de poursuivre.
L’énergie bon marché et inépuisable doit être à la portée
de tous.
* * *
L'Opossum s'arrima à la station par le côté gauche du poste de pilotage. Une ventouse y adhéra avec un bruit de succion, puis un dispositif à air comprimé évacua l'eau de mer afin de dégager l'accès.
Le sas étanche débouchait sur une pièce carrée dépourvue de mobilier. C'était une sorte de vestibule avec deux portes rectangulaires à gauche de l’entrée et une troisième, face au sas, de forme ovale.
Suivez-moi. dit le pilote en posant la paume de sa main sur le lecteur digital situé à droite de la porte ovale. Les autres portes conduisent aux installations de ce module, mais je n'ai pas le droit de vous y amener.
Où allons-nous alors ? demanda Liam en haussant les épaules.
Au coeur de la station, mais vous allez apprécier le détour, ne vous en faîtes pas. De toutes façons, nous devons passer par là pour emprunter un autre moyen de locomotion.
O'Donnel eut un sourire énigmatique et n'en dit pas plus.
Quand ils franchirent tous les quatre la porte ovale, que le pilote prit bon soin de refermer, ils débouchèrent dans le tube en glassite transparent qui menait du module à la station centrale. Il mesurait une cinquantaine de mètres de long. Le sol était composé de dalles en caoutchouc. Une série de rampes lumineuses était disposée à intervalles réguliers.
Le tube aboutissait devant une autre porte étanche munie elle aussi d'un lecteur digital. En remarquant ce détail. Liam se dit que la conception des systèmes de sécurité devait être l'oeuvre d'un spécialiste militaire de haut niveau, qui avait voulu isoler chaque accès au module central. Coupé comme il l’était, le tube devenait un genre de pont-levis donnant accès à une forteresse.
Skinny posa sa main à l'endroit prévu et la porte s’ouvrit avec un chuintement.
Venez, les invita-t-il d'un ton jovial. Le commandant de la station nous attend.
Le commandant Balboa, menu et tout en nerfs, but une gorgée de son café et considéra longuement ses invités, un mince sourire aux lèvres.
Ils se trouvaient dans l’observatoire situé sous la coupole transparente de la station. Filtrés par l'eau de mer, les rayons du soleil à mi-course vers son zénith baignaient la pièce d’une lumière chatoyante.
Ses deux invités fixaient la coupole iridescente avec une expression d'émerveillement sur le visage. Personne n’osait parler, craignant de rompre le charme.
Le commandant Balboa finit son café et posa la tasse sur la table basse. Il paraissait trop jeune pour un poste impliquant de si grandes responsabilités. Son allure était dynamique et son regard luisait d’amusement.
Vous aimez, n'esl-ce pas ? demanda-t-il sans s’adresser à personne en particulier.
Irbit, qui avait le sentiment de vivre dans une autre dimension depuis le début de leur escapade, tourna vers lui un visage baigné de lumière.
Aimer c’est un mot trop faible, Commandant, dit-elle avec enthousiasme. Le spectacle m’a d'abord surprise, mais maintenant je suis tout à fait séduite !
Balboa sourit et ses yeux se plissèrent jusqu’à devenir deux minces fentes.
Je dois vous avouer que moi aussi j'étais sous le charme le jour où nous avons fini d'installer la coupole. La beauté de ce spectacle nous a captivés tous. J'irai même plus loin : après quelques semaines passées sous ce dôme, on acquiert un regard différent sur la vie. je veux dire de la vie en surface; on en comprend mieux la futilité.
Irbit le regarda avec un intérêt accru. Pour un scientifique censé être peu enclin à ce genre de manifestation, il exprimait ses sentiments avec beaucoup d'aisance.
Depuis combien de temps êtes-vous en poste ici ? s’enquit-elle.
Voyons, cela doit faire plus de trois mois déjà, dit-il avec une pointe d'étonnement en se tournant vers elle. La lumière du soleil, transformée par l'eau, faisait danser des couleurs subtiles dans les yeux de la jeune fille ainsi que sur ses joues.
Notre pilote nous a dit en chemin que les premiers jours sont assez difficiles quand on est isolé dans les profondeurs et coupé de tout. Ça n’a pas été trop pénible pour vous de rester enfermé ?
Enfermé ? Mais pour quelle raison devrais-je rester enfermé, dites-moi ? répondit Balboa avec un rire étouffé. La plupart d'entre nous sortons sans arrêt, soit pour nous occuper de nos plantations d'algues ou pour notre propre plaisir. La mer est si vaste que notre vrai problème ne vient pas du confinement, mais plutôt du simple danger de nous perdre ! Non, franchement, je ne regrette rien, si ce n'est le fait de n'avoir pas connu votre grand- père quelques années plus tôt...
11 considéra la jeune fille et haussa les épaules avec une légère trace de condescendance. Il savait très bien qu'elle ne pouvait pas comprendre, ni encore moins partager cet amour exclusif et sensuel que la mer lui inspirait. Son compagnon non plus, d’ailleurs. Ils étaient à peine arrivés de la surface. Balboa avait conscience d'appartenir à une nouvelle caste de privilégiés, destinée à peupler le fond de la mer et à vivre en symbiose avec elle. Il se sentait vraiment chez lui sous le dôme, mais comme il détestait expliquer ce sentiment à des terriens, il préféra aborder un autre sujet.
J'ai cru comprendre que ce bon vieux Skinny a l’intention
de vous conduire à...
Ne dites rien. Commandant, interrompit le pilote. Il ne faut surtout pas leur gâcher la surprise !
Liam jeta un regard curieux à ces nouveaux habitants des profondeurs et sourit à son tour. Bien entendu, il n'avait aucune idée de l'endroit où O'Donnel comptait les mener, mais cela importait peu. Lui aussi se disait que la vie dans les fonds sous- marins leur réservait des moments très forts.
Il n'est que dix heures et demi, intervint Balboa après un rapide coup d'oeil à sa montre. Si vous ne perdez pas de temps, vous pourrez être de retour pour déjeuner. La façon dont notre maître coq accommode les ressources marines est remarquable. Du grand art. je vous l'avoue !
En se levant pour leur montrer le chemin, le commandant Balboa surprit une moue dans les traits de la jeune fille. Elle se leva aussi, mais son regard s’arracha de la coupole avec regret.
Partez sans crainte, Irbit, l’encouragea Balboa en posant une main amicale sur son épaule. A l'heure du déjeuner, le soleil aura atteint son zénith et frappera directement le sommet de notre dôme. Le spectacle sera éblouissant.
En quittant la station, le petit submersible qu'O'Donnel pilotait avec dextérité mit le cap au 240 durant sept ou huit cent mètres et obliqua ensuite vers l'est en direction de la côte, irbit et Liam étaient à son bord.
Le cap qu'ils avaient pris à présent était légèrement plus au sud que celui qu’ils avaient emprunté en allant vers la station. Ils longeaient l'extrémité méridionale du plateau où ils avaient aperçu les fume

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ʣif corallien. O'Donnel réduisit la vitesse du sous- marin pour permettre à ses passagers de jouir du spectacle.
Aucunement gênée par le submersible, une raie manta planait à quelques mètres du fond, poussée par le faible courant. Des dizaines de poissons aux couleurs vives se maintenaient à distance prudente et regardaient avec curiosité ou effroi ce monstre aux entrailles transparentes surgi de nulle part qui s’enfonçait dans leur territoire.
Un vieux mérou d'une centaine de kilos se tourna vers eux d’un mouvement puissant de sa nageoire caudale et fixa les passagers de ses yeux démesurés et glauques. Il ouvrait et refermait sa bouche aplatie comme s'il souhaitait s'adresser aux passagers. Son corps, d'un brun roux, portait les traces d'une rude lutte pour la survie. Le mérou poursuivit encore un moment son discours muet, puis finit par se lasser de son monologue. Il leur tourna le dos d'un majestueux coup de queue et repartit vers le récif corallien, fendant les eaux avec nonchalance.
Comme Y Opossum était en train de sortir du champ de possidonies, le pilote augmenta légèrement la vitesse. La plateforme continentale s'étirait à perte de vue. Le paysage, entrecoupé ça et là par quelques rochers épars, devint peu à peu monotone, car l’effet d'optique le faisait paraître interminable. Un terrain sablonneux se perdait ensuite à l'horizon, mais en raison des mauvaises conditions de visibilité ils ne pouvaient pas juger de son importance..
- Nous arriverons dans un peu moins d'un quart d'heure à notre première station sous-marine, dit le pilote en tournant vers Mike un visage où dansait le reflet des lumières du poste. Nous sommes actuellement à quatre-vingt-treize mètres de profondeur. La température extérieure de l'eau est de six degrés, annonça O'Donnel. Après le prochain virage, nous remonterons jusqu'à
trente-sept mètres.
Pendant que Y Opossum s'inclinait à l'assaut d'un plateau, Liam conclut que l'ensemble de connaissances que le cheik saoudien avait réussi à mettre en oeuvre ne pouvait pas provenir de l'espionnage industriel, aussi coordonné qu'il fût. Les recherches requises dépassaient largement ce cadre.
L’Irlandais regarda Irbit à la dérobée. Elle était absorbée dans la contemplation du paysage, et le pli soucieux de son front avait disparu. Ses traits avaient retrouvé l'insouciance et l'émerveillement de la jeunesse. Une veine minuscule battait contre sa tempe et sa poitrine se soulevait au rythme d’une respiration quelque peu accélérée.
En raison de la remontée, la lumière extérieure changeait graduellement. Elle prenait maintenant des tons turquoise et couvrait la flore exubérante d’un manteau étincelant. L’ascension ne dura que deux ou trois minutes. Un vaste plateau s’offrit alors à leurs yeux, s’étendant sur plusieurs kilomètres carrés, mais le regard n'arrivait pas à atteindre les limites. L'Opossum traversa d'étranges champs scindés en deux, comme si un socle géant avait tracé un sillon au fond de la mer.
A leur droite s'étendait ce qui paraissait être une culture d'algues dont les feuilles filamenteuses étaient recouvertes de spores translucides. A gauche, en revanche, le champ avait l’air d'une bananeraie ou d'une gigantesque plantation de tabac.
- La station sous-marine est droit devant, juste après notre ferme marine, dit le pilote. Ça vaut le coup d'oeil.
L’intonation de sa voix montrait à quel point il se sentait orgueilleux du travail accompli, même s’il avait déjà fait cette route des dizaines de fois. Les passagers, qui avaient tourné leurs regards dans la direction indiquée, prirent subitement la pleine mesure du projet auquel Cheik Yoran avait voué sa vie.
Telle qu'elle leur apparut au loin, la station s’adaptait parfaitement au milieu dans lequel elle s’intégrait. Sa forme faisait penser à une planète dotée d'une ceinture d’astéroïdes.
Comme Y Opossum se trouvait encore à cinq ou six cent mètres d’elle, ils bénéficiaient d'un panorama général mais ne pouvaient qu'estimer sa taille. En s’approchant, les détails de la
construction apparurent les uns après les autres.
Skinny O’Donnel, qui avait déjà conduit de nombreuses équipes à la station, imaginait aisément les sentiments qu’éprouvaient ses passagers. La petite fille de Yoran méritait bien quelques explications.
- La station est divisée en deux parties, fit-il en enclenchant la conduite automatique avant l'approche finale. Il y a d’abord le centre de commandement, qui abrite aussi les parties communes et les générateurs. 11 se trouve dans la demi-sphère centrale. Ensuite, les dépendances et les services annexes spécialisés sont installés dans les dix-huit modules sphériques qui composent le cercle extérieur. Ils sont reliés au centre de commande par des structures tubulaires en glassite de deux mètres et demi de diamètre.
Il leur expliqua que le grand-père d’Irbit s’était basé sur les expériences “Précontinent" du français Cousteau, et sur celles conduites par les Américains avec les “Janus’’. Aussi bien les Français que les Américains avaient obtenu des résultats extraordinaires mais avaient fini par abandonner leurs recherches.
Cheik Yoran s’était servi de cette technologie à l’abandon et l’avait mise en valeur en modernisant certains concepts. L’originalité de cette station par rapport aux précédentes tentatives résidait d’abord dans son architecture. L’innovation principale était là.
Membre à part entière de la nouvelle génération de scientifiques passionnés par la mer. Liam connaissait les expériences menées par les Français et par 'les Américains. Les raisons ayant motivé leur abandon lui échappaient toujours. L’océan, si riche de promesses, méritait mieux qu’une série de tentatives sans lendemain, mais les gouvernements ne semblaient pas s’y intéresser.
Les fonds nécessaires à l’exploitation de la mer n'étaient pas le véritable obstacle. Des millions de dollars étaient engloutis tous les ans dans des opérations beaucoup plus hasardeuses, dans des études de systèmes d’armement inédits qui n’aboutissaient jamais, ou par la dilapidation des fonds publics dans des projets farfelus ou dans des malversations de toutes sortes. Et l’océan nous attendait toujours, ses pis gonflés d'un lait que personne n’osait
L'Opossum se trouvait à présent à moins de deux cent mètres de la station. Les passagers pouvaient se faire maintenant une idée approximative de ses véritables proportions. Une lumière rouge se mit à clignoter près du profondimètre à ce moment-là. Le pilote, comprenant qu'ils venaient de dépasser la balise, reprit le contrôle manuel du sous-marin tout en poursuivant ses explications :
A l’heure actuelle, nous avons terminé une deuxième station analogue qui sera bientôt en activité. Sa zone d’influence s'étend sur un périmètre de dix-huit kilomètres carrés. Dans chaque station, nous aurons en permanence une équipe oscillant entre huit et dix personnes, relayées tous les quinze jours par des remplaçants venant du Nid.
L'Opossum, après un léger virage, entama la dernière ligne droite avant la station. Ils arrivaient à la hauteur d’une colonie de madrépores d'une taille extraordinaire. O'Donnel éteignit le commutateur des rampes lumineuses latérales, ne laissant allumé que le puissant phare avant.
Une installation de ce genre doit coûter une véritable fortune ! s’exclama Liam.
Pas tant que ça, ne croyez pas. dit le pilote en balayant son objection d’une chiquenaude. Pour vous donner un ordre d'idée, le coût approximatif d'une station comme celle que nous avons devant nous est à peu près le tiers de celui d'un barrage de moyenne importance, ce qui n'est pas rien, je vous l’accorde.
Le doute qu’il lut dans le visage de son passager le poussa à com

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herchait de nodules métalliques à trois cent mètres de profondeur.
Il avait été embauché par les hommes de Cheik Yoran un an plus tôt. Le salaire et la perspective d'une expérience passionnante dans le secret total étaient des arguments très convaincants.
O’Donnel se rendit compte que Liam le regardait avec un soupçon d’amusement. Il était souvent perdu dans ses pensés, et savait qu’il arborait dans ces cas-là un air distrait. Le pilote s’empressa de faire un salut de la tête après une oeillade timide en direction d’Irbit. Comme tout le personnel du complexe, il avait entendu des rumeurs concernant la petite fille de Yoran. Il la trouva très belle, mais remarqua que son front était barré d’un pli soucieux. La vie qu’elle avait menée et son enfance gâchée avaient laissé des traces... O’Donnel haussa les épaules et sourit tristement.
- Avant d’embarquer dans Y Opossum je vais vous donner quelques consignes de sécurité. Ce n’est que de la routine.
Il s'avança vers le sous-marin et montra de l’index la partie immergée.
La fragilité de la coque de Y Opossum n'est qu'apparente. Pour percer la paroi de glassite. il faudrait un choc d'une violence rare. Dans un parcours standard comme celui que nous allons faire, le seul danger potentiel viendrait d'une baisse subite de la pression intérieure. Si cela arrivait, des masques respiratoires tomberaient du plafond, un peu comme dans les avions de ligne. Ils contiennent un mélange d'oxygène et d'hélium adapté pour la respiration à cette profondeur.
Le pilote jeta un coup d'oeil en direction du grutier qui était en train d'enlever le crochet du treuil. Le technicien avait presque terminé.
Notre ennemi principal est l'azote dans le sang. L'Opossum n'est pas équipé de scaphandres autonomes permettant aux passagers d'abandonner le navire. En revanche, la balise de détresse activée, l'équipe de secours du Nid ne tarderait pas à arriver sur les lieux. En cas de baisse brutale de la température, assez peu probable je dois dire. Y Opossum dispose de couvertures chauffantes. Elles se trouvent sous les sièges. Des questions ?
Liam confirma du chef.
Juste une. Monsieur O'Donnel.
Appelez-moi Skinny, l'interrompit le pilote avec un sourire engageant.
Moi c'est Liam. dit-il. Quelle sera la durée de notre petite excursion ?
- Je ne crois pas que nous serons absents plus de deux ou trois heures. Peut-être un peu plus, si ce que j'ai l'intention de vous montrer vous intéresse...
O'Donnel sourit à nouveau.
J'ai cru comprendre que vous étiez archéologue, n’est-ce
pas ?
Liam affirma de la tête et regarda le pilote avec une attention accrue.
Alors venez, ne perdons pas de temps. Les “rampants" ont terminé leur boulot.
O'Donnel se dirigea d'un pas ferme vers la passerelle métallique qui avait été tendue entre Y Opossum et le quai. 11 sauta sur le pont et ouvrit 1 'écoutille de proue en tournant le volant de
sécurité.
Quelques minutes plus tard, quand tout le monde fut installé à bord, le submersible s'enfonça dans l'eau avec un bruit assourdi provenant des turbines.
Les doigts de Skinny O'Donnel volèrent sur les touches pour vérifier la check-list. Quand cela fut fait, il ouvrit ensuite les ballasts. Il était sanglé dans son siège face au tableau de commandes de Y Opossum, les mains posées sur le levier de profondeur et sur le propulseur. Ses pieds reposaient sur les pédales de direction. Des lumières multicolores éclairaient la cabine comme un théâtre de Broadway. Avec ses commandes manuelles, ses pédaliers, ses contrôles et voyants de toutes sortes et son horizon artificiel, le panneau avant ressemblait à celui d’un hélicoptère, mais la similitude s’arrêtait là. Dans les entrailles de VOpossum, l’équipement avait été miniaturisé à l’extrême. L’informatique, les détecteurs sonar actifs et passifs, le système de communications sophistiqué tenant compte de la distorsion des ondes provoquée par l’eau, tous les éléments indispensables à la bonne marche de cette machine en faisaient un exemplaire unique en son genre, d’un coût prohibitif.
O'Donnel actionna le système de guidage laser qui permettait à V Opossum de se déplacer selon le cap prévu. L’ordinateur corrigeait au fur et à mesure la profondeur et la dérive en jouant avec les ballasts. Au bout de quatre ou cinq secondes, une lumière orangée se mit à clignoter sur le tableau de bord. Skinny comprit qu’il se trouvait déjà à moins de dix mètres de la balise de guidage. Il se mit sur conduite automatique et se détendit un instant.
- A toi de jouer, ma belle ! dit-il avec un clin d’oeil complice en direction de l’ordinateur. Moins de deux minutes plus tard, un ronflement à peine perceptible lui apprit que l'Opossum venait de stabiliser ses ballasts.
Avant de lancer la turbine, le pilote suivit machinalement dans l'écouteur la litanie habituelle des contrôles de sécurité effectués par l'ordinateur. Quand tous les témoins lumineux furent au vert, il programma sa destination en introduisant les références avec son clavier. Comme il pouvait choisir la conduite automatique ou manuelle, il hésita une seconde et opta pour garder
la conduite manuelle. Il aurait ainsi la liberté de moduler sa vitesse.
Avant d’actionner la commande de départ, il se tourna vers ses passagers afin de vérifier s’ils étaient correctement installés. Irbit et Liam étaient assis à côté de lui, à la place habituelle du copilote et du navigateur. Mike se trouvait derrière eux, le buste raide et le regard concentré.
Cela étant fait, Skinny mit en route les rampes lumineuses extérieures. Deux rangées de quatre rampes étaient situées au dessus et au dessous du poste de pilotage, ainsi que deux autres de huit lampes courant le long des flancs de Y Opossum.
Comme l'eau du bassin était soumise à des turbulences, les passagers n’apercevaient que le reflet de leurs propres visages collés à la paroi de glassite. Le pilote entama alors la procédure de dégagement .
Contrôle, ici Opossum. Je suis paré pour le largage.
Roger, Opossum. Vous avez le feu vert. Allez-y et bonne promenade ! répondit dans son auriculaire la voix à l’accent australien du responsable du trafic sous-marin.
Avec un frémissement qui agita légèrement l’habitacle, Y Opossum se libéra de l’immobilité. Le guidage laser allait les conduire comme un fil d'Ariane pendant la durée de leur parcours.
La traversée du bassin se déroula en quelques secondes. Ensuite. Y Opossum s’engagea dans un tunnel creusé dans la roche friable. Les parois semblaient dangereusement proches mais, au grand soulagement des passagers, la longueur du tunnel n’excédait pas une vingtaine de mètres. Bientôt, et malgré la profondeur, la lumière du jour inonda l'habitacle faisant disparaître la sensation d'oppression qu'ils avaient éprouvée. Les rampes lumineuses accentuaient cette impression de sécurité retrouvée.
Leur route décrivait une ellipse le long du récif corallien, qui grouillait de vie. Effrayés, des poissons s’écartaient du chemin de Y Opossum avec des mouvements vifs et s’égayaient dans tous les sens. Dans leur précipitation, certains heurtaient le sous-marin puis repartaient en sens contraire d'une nage incertaine. Le submersible s'inclina de quelques degrés pour amorcer un virage et se redressa à la sortie, s’éloignant du récif corallien. Plusieurs centaines de mètres plus loin, l’attention des passagers fut attirée
par d'innombrables fumerolles volcaniques en activité. Beaucoup d’entre elles dégageaient un épais nuage cendré. Des bulles épaisses s’élevaient en tourbillonnant vers la surface. Le fond de la mer était stérile aux alentours.
Après un nouveau virage vers le nord, Y Opossum pénétra dans un vaste champ de possidonies qui prenait naissance au pied d'un nouveau r

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Nid et pour parfaire nos expériences. Cela impliquait, bien entendu, la construction d'une flottille de véhicules aptes à mener à bien ces missions, et des locaux assez spacieux pour les entreposer.
Mike désigna l’ensemble des installations et s’avança vers
l'intérieur.
Plus difficile encore que les problèmes techniques, dit-il en marchant, et nous en avons rencontrés de toutes sortes, a été l’acclimatation des hommes à l’espace confiné dans lequel nous vivons. Une semaine ou deux sont vite passées, mais plusieurs mois d'affilée, même si nos tâches nous maintiennent continuellement occupés, provoquent des troubles du comportement. Certains s'irritaient pour un rien, d'autres devenaient apathiques. Malgré de nombreuses tentatives, nous n’avons pas trouvé de véritable solution à ce problème. Maintenant ça va mieux, surtout parce que nous savons que la fin est proche.
Que voulez-vous dire par là ? demanda Liam.
Vous le saurez toujours assez tôt, ne vous inquiétez pas ! répondit l'homme de Yoran en s’éloignant de là sans préciser davantage sa pensée.
Une trentaine de mètres plus loin, ils découvrirent que la surface réservée aux véhicules sous-marins était plus importante que les précédentes. Elle possédait un bassin qu'ils n'avaient pas vu au début parce qu'il avait été creusé dans un renfoncement situé à droite de l'entrée.
Le plan d'eau était à la mesure du gigantisme qui avait présidé l'installation du complexe. Liam estima d'un coup d'oeil qu'il devait mesurer entre deux ou trois cent mètres carrés.
Sous la lumière tamisée des allogènes, le bassin donnait l'impression d'être recouvert d'un tissu plastifié d’un vert émeraude soutenu. Bien entendu, cette impression était trompeuse, car la surface bougeait. Presque imperceptiblement, mais elle frémissait.
Après avoir contourné divers modules de service, le petit groupe s'approcha du bassin, qui avait la forme d'un haricot avec une extrémité aplatie servant de quai. Trois bâtiments étaient à l'amarre côte à côte, et un quatrième, fuselé comme un cigare, pendait au bout d’un treuil au dessus de l'eau. Des techniciens étaient en train de l'amener vers le quai.
Irbit et Liam firent quelques pas sur le tablier de l’embarcadère. L'Irlandais, s'arrêtant un instant, porta son regard à droite, puis à gauche, embrassant tout le panorama. Irbit était aussi
stupéfaite que lui. L'opacité de l'eau ne permettait pas de se faire une idée de la taille des bâtiments amarrés. Seule était visible une partie de leurs superstructures, le reste étant immergé.
Le jeune Irlandais, qui suivait avec un grand intérêt les recherches conduites par plusieurs équipes d'archéologues américains dans les fonds marins, identifia sans peine le type de bâtiment que Cheik Yoran s'était procuré. Ce genre de sous-marin était utilisé dans la recherche océanographique à grande profondeur. Il avait déjà lu diverses publications techniques qui décrivaient en détail les possibilités de ce type de navire, et la nouvelle génération d’archéologues avait pu se familiariser avec leur utilisation.
Les Français, précurseurs dans ce domaine, avaient construit plusieurs submersibles océanographiques pour le compte de la COMEX. Leur réussite avait incité les Etats Unis à mettre en chantier des engins similaires. Une nouvelle technologie était née. Elle ouvrait aux humains le plus vaste terrain de recherches qui soit, proche et encore mal connu : la mer dans ses grandes profondeurs.
Parmi les trois sous-marins amarrés au quai, l'un d'eux ressemblait au sous-marin français Saga /. oeuvre du génial Delauze. C'était un sous-marin nucléaire d'essai et d’exploration, utilisé déjà avec succès par l'industrie pétrolière. Si sa forme rappelait, mais en beaucoup plus petit, celle des submersibles à propulsion nucléaire en service dans les flottes des grandes puissances, ses performances à grande profondeur étaient une véritable révolution dans le monde du silence.
Les deux autres sous-marins de poche de Yoran étaient des parents proches du Nautile et de l'Alvin. Avec leur carène disgracieuse et beaucoup plus petits que le premier, ils avaient l'allure d'insectes maladroits. Leur corps trapu et peu hydrodynamique avait été conçu pour mettre en oeuvre un appareillage composé de bras et de vérins dotés de capteurs et de caméras vidéo d’une sensibilité supérieure à la perception humaine. Visiblement, les concepteurs avaient sacrifié la vitesse au profit des performances techniques.
Le quatrième sous-marin, celui qui était suspendu au bout d'un filin, était formé d'un long tube transparent en glassite renforcé par une structure annulaire. Des sièges pour une vingtaine de passagers étaient disposés sur deux rangées à l'intérieur de ce tube. Le poste de pilotage se trouvait à la proue, et les turbines de propulsion à la poupe.
Pour une raison ou pour une autre, Mike avait volontairement laissé à Liam le temps d’examiner les sous-marins et de se faire une opinion. Après une analyse rapide, le jeune archéologue conclut que. en tout état de cause. Cheik Yoran avait bénéficié de complicités au plus haut niveau, tant politiques que scientifiques. Plus déroulant encore, le secret avait été maintenu, ce qui impliquait nécessairement l'appui ou la complaisance d'une autorité supranationale. Et à la façon dont se comportait le transfuge de l'Ile de Beauté, Liam conclut que cet état de fait ne datait pas d'hier.
La grue déplaça le sous-marin fuselé au dessus d'une balise orange qui flottait dans le bassin, puis amorça doucement la descente. Son nom figurait en caractères rouges sur la superstructure. Il s’appelait VOpossum.
Le seabus plongea doucement dans l’eau et sa masse provoqua des vaguelettes qui secouèrent les trois autres sous- marins avant de venir lécher le quai. Un instant plus tard, son corps tubulaire disparut sous la surface émeraude, ne laissant à l’extérieur que deux écoutilles circulaires et une passerelle en métal qui les reliait.
- Notre pilote ne devrait pas tarder à arriver, dit Mike en se tournant vers la partie la plus large du hangar, en face du bassin. Tiens ! fit-’ 1 en élevant légèrement le ton. Il arrive enfin. J'ai le plaisir de vous présenter “Skinny O’Donnel. Il va nous conduire
pour un petit voyage que. j'en suis persuadé, vous n'êtes pas prêts d’oublier !
La personne qui venait dans leur direction était un garçon fluet âgé d une trentaine d'années. De petite taille, la combinaison vert olive qui lui collait à la peau accentuait son aspect malingre. Avec ses cneveux châtains coupés court et sa démarche un peu
: Décharné, naiare
raide, son allure avait quelque chose d'automatique.
“Skinny “ O’Donnel avançait vers eux les mains dans le dos, un sourire confiant aux lèvres. Pour lui, chaque sortie aux commandes d’un submersible était une aventure extraordinaire dont il escomptait tirer un maximum de plaisir.
11 avait servi comme second officier pilote pendant huit ans dans la marine U.S. à bord d’un sous-marin de la classe Typhoon. C'était avant la Pérestroïka. Les sous-mariniers qui avaient servi pendant la guerre froide ne se lassaient pas de raconter leurs aventures du temps où ils donnaient la chasse aux sous-marins ou aux navires de surface de la flotte soviétique. C'était pour eux le temps héroïque des cow-boys et des Indiens. Beaucoup parmi eux, d’ailleurs, regrettaient toujours cette époque.
“Skinny” O’Donnel avait fini par quitter la marine et s’était reconverti dans le privé. Là au moins, en pilotant un sous- marin de poche, seul maître à bord, aucune journée ne ressemblait à la précédente, quand il fallait changer le trépan d’une foreuse dans une mer démontée pour le compte d'une compagnie pétrolière, où quand il rec

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é passionné par la mer. Mais pour quelle raison ton grand-père s’est-il donné la peine de fouiller dans mon passé ?
Simple routine. Il voulait tout savoir sur l’équipe qui dirigeait les fouilles. C’est un homme consciencieux.
L’explication, même si elle semblait justifier l’attitude de son grand-père, manquait de sincérité. Liam se doutait qu’Irbit devait avoir d’autres motivations.
Maintenant que nous connaissons le genre d’activité à laquelle se livre ton grand-père, je comprends qu’il ait préféré s’entourer d’un grand luxe de précautions avant de nous autoriser à franchir la porte du complexe. Cela n’explique toujours pas pourquoi tu as fouillé dans ses archives pour retrouver ma fiche...
Irbit soupira, consciente que Liam aurait préféré une autre réponse que celle qu’elle allait lui donner.
Je voulais simplement savoir si tu avais des connaissances en plongée sous-marine. Sans ça, tu n’aurais pas pu m’accompagner ce matin, dit-elle sans se démonter.
Liam la regarda d’un air amusé, mais se contenta de cette explication.
Qu’est-ce que tu as appris d’autre me concernant ? lança- t-il en bouclant la ceinture de sa combinaison.
Surtout des informations à propos de la vie de ta famille en Irlande, tes activités sur le campus de l’université, tes habitudes, et même ta marque préférée de slips ! dit-elle d’un ton espiègle. Ces détails n’ont pas d’importance. L’essentiel était de savoir si tu avais fréquenté des personnes ayant pu nuire de près ou de loin au projet de mon grand-père, ou ayant eu une activité suspecte. Je te rassure tout de suite, le professeur Keifer et toi n’avez rien à craindre à ce sujet. Vous êtes aussi clean que l’enfant qui vient de naître.
Même si tes raisons étaient tout à fait honorables, convint- il, conciliant, maintenant tu as un avantage sur moi. Tu connais presque tout à mon propos, mais je ne sais toujours quasiment rien à ton sujet. Le jeu est inégal !
Liam avait fini de revêtir sa combinaison.
Irbit prit le temps de fermer la glissière de son bustier avant de répondre.
Qu’est-ce que tu veux savoir au juste ?
J'aurais beaucoup de questions a te poser, dit-il. l'air songeur, mais j'espère que cela ne nous empêchera pas de poursuivre cette conversation à un autre moment. Quand et pourquoi ta mère a-t-elle disparu. Irbit ?
La jeune fille se raidit et ses yeux noirs clignotèrent d'un air malheureux. Par une sorte d'entente tacite, la disparition de sa mère avait toujours été un sujet interdit à la maison. Les vêtements, les photos, les films tournés au hasard des voyages, son père avait fait enlever toute trace de sa présence parmi eux. comme si elle n’avait jamais existé.
Je ne sais pas. Vraiment, je n'ai aucune idée, affirma Irbit en secouant vigoureusement la tête. J'ai parfois l'impression qu'elle vit quelque part. Dans ces cas-là, j'essaye simplement de ne pas me laisser gagner par la déprime.
Liam sentit qu'elle venait à nouveau de lui échapper. D'ailleurs, elle n'avait visiblement aucune envie de discuter de ce problème douloureux.
Maintenant dépêchons-nous, dit-elle en posant les mains sur les hanches dans une attitude de défi. Quelqu'un nous attend dans le parking depuis un bon moment. Il doit commencer à se poser des questions à notre sujet...
Après la porte de sécurité, le parking n'était séparé du vestiaire que par un escalier en spirale qu'ils descendirent d'un bon pas. Un homme les attendait effectivement au bas des marches.
- Vous pouvez m’appeler Mike ! dit un personnage bien en chair d'un ton anodin. Mike avait une méfiance innée pour quiconque n’atteignait pas la moitié de son poids.
Son nom d'emprunt ne lui convenait pas. Avec la couleur pain d'épice de son teint, ses épais sourcils et surtout avec son accent corse à couper au couteau, il avait un air aussi anglo-saxon que le chant des cigales.
Il était revêtu d'une combinaison similaire à la leur, quoique la sienne était d’une couleur un peu plus sombre. Le tissu dessinait sa puissante carrure, soulignant en particulier la rondeur de ses fesses, excessivement proéminentes.
Ne vous étonnez pas de l’apparente légèreté de votre combinaison, dit Mike en passant sur la sienne une main aussi large qu'une planche à découper la viande. Le matériau dans lesquelles elles sont tissées est étanche et isotherme. Elles collent au corps, empêchent les infiltrations de toute nature, et maintiennent la température de l’épiderme à un niveau constant. Le temps du néoprène est complètement révolu ! ajouta-t-il avec son accent inimitable.
Il les précédait toujours quand ils arrivèrent au sas de sécurité.
De toutes manières, nous n'aurons pas l’occasion de tester leurs performances, au moins je l'espère ! Nous portons ces combinaisons au cas où, poursuivit leur guide en se tournant vers eux, sans expliquer ce qu'il entendait par “un cas où”.
Mike posa sa main sur le lecteur d'empreintes digitales situé à droite de la porte étanche. Celle-ci s’effaça, et il passa en premier d’une démarche alerte.
La surprise de Liam quand il pénétra dans les lieux rappela à Irbit l'expression qu'elle avait vu dans le visage du professeur Keifer quand il était rentré pour la première fois dans la salle de conférences. C'était un mélange d’étonnement et d’admiration.
Le hangar était à la démesure du reste du complexe. C’était un lieu de plusieurs centaines de mètres carrés divisé en trois zones, chacune réservée à une catégorie de véhicules, terrestres, marins ou sous-marins.
Sa curiosité aiguisée, Liam s’approcha d’un véhicule en forme de tube doté de quatre roues escamotables. La carène était faite dans un matériau composite ressemblant à de la céramique. Une bulle amovible en glassite permettait l’accès à l’engin.
Le transfuge de Calvi toisa Liam, qui le regardait d'un oeil étonné avec une sorte de satisfaction bienveillante, puis se souvint tout à coup qu'ils avaient un horaire et un programme à respecter.
Dépêchons-nous, dit-il, plus corse que jamais. Nous sommes déjà en retard.
Le petit groupe traversa le premier hangar, où étaient garés les véhicules terrestres. Sur le côté droit, des boxes étaient affectés aux réparations et au stockage des pièces détachées. L'un d’eux, abritant les appareils électriques de réglage et de contrôle, était fermé du haut en bas par une baie vitrée. Partout ici. le XXI siècle était largement entamé.
Le parking des véhicules marins n’était séparé du précédent que par un vaste arc voûtant. Liam considéra la largeur du hangar et la hauteur des murs, mais il n'eut pas le loisir de s’attarder. Mike avait pressé le pas et marchait à présent dix mètres devant eux.
Le Corse s'arrêta à l’entrée du hangar des véhicules sous- marins et attendit qu’Irbit et Liam soient arrivés à sa hauteur. Il leur montra alors la cavité creusée dans la roche d'un large geste de la main, tel un propriétaire accompagnant ses hôtes pour une visite guidée.
Voici la dernière réalisation sortie du cerveau privilégié de votre grand-père, dit-il en pénétrant sous la voûte d'un pas quelque peu cérémonieux. Nous avons eu beaucoup de mal à venir à bout des infiltrations.
Mike s’appuya contre l’une des poutrelles d’acier qui formaient l'ossature de la cavité. La roche était un peu plus friable ici, et la différence de pression entre l’intérieur et l’extérieur affaiblissait encore sa résistance. Il avait donc fallu étayer les parois et la voûte avec des solives pour renfoncer la structure. 11 poursuivit :
Le problème auquel nous étions confrontés était simple : nous devions nous assurer la maîtrise du fond de la mer afin d'en exploiter convenablement ses richesses pour nourrir la population du

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leversements que vous allez introduire dans cette partie du monde doivent éveiller toutes les convoitises. Un nouvel ordre économique dans ce continent signifie la fin des privilèges d’une caste qui se partage allègrement le pouvoir et les richesses. Et les habitudes ont la peau dure, surtout les mauvaises !
Le professeur Keifer, lui, ne s’était pas arrêté à ce genre de considérations. Il suivait un fil conducteur très précis et, comme lorsqu’il dirigeait ses fouilles, rien ni personne ne pouvait l’en éloigner.
Les sources d’énergie connues sont aujourd'hui assez diversifiées, dit-il en passant mentalement en revue celles qu'il connaissait. Si celle que vous avez découverte est réellement révolutionnaire, et je n'ai aucun à priori là-dessus, elle doit donc être...
Sa phrase demeura en suspens, et Cheik Yoran prit un temps avant de fermer cette parenthèse. Il savait que ses paroles allaient déclencher la même réaction que si quelqu’un tentait de démontrer la quadrature du cercle.
La source d'énergie que nous avons mise au point a deux caractéristiques assez particulières, commença Yoran en appuyant sur le mot “particulières”. D'abord, cette énergie est pratiquement gratuite. Ensuite, elle est inépuisable. En un mot, ces particularités proviennent de la source qui est à son origine et qui la propage.
Quelle est cette source ? demanda Liam d’une voix où se mêlaient l’admiration et l’impatience. Il avait du mal à se concentrer depuis quelques instants. Les paroles de Yoran l'avaient troublé et, tandis qu’il parlait, un rayon de lumière réfléchi par le sel gemme venait d'auréoler la chevelure d'Irbit d'une couronne d’argent, éclairant son visage et adoucissant ses traits. Son esprit vacillait entre l’attention qu'il souhaitait porter au problème soulevé par Yoran et cette force irrésistible qui l’attirait vers elle.
Je n'ai pas l’intention, jeune homme, de vous donner un cours magistral sur la tectonique des plaques ni sur le frottement des couches thermoclines de la mer. Je vais simplement essayer de répondre de mon mieux.
Yoran saisit un crayon optique et se mit à tracer un nouveau diagramme sur son moniteur. Le dessin apparut aussitôt sur le grand écran installé au milieu de la salle, traité et corrigé par le logiciel contenu dans le disque dur de sa machine. La première figure représentait un cube remplit d'eau aux trois quarts. Deux galettes aplaties étaient censées constituer le fond de l’océan.
Entre la surface et la plateforme continentale, expliqua Yoran en dessinant deux Lèches pointées l’une au dessus de l’autre et en direction opposée, les courants sous-marins s'interpénétrent ou se succèdent à diverses profondeurs. Ce mouvement est constant. 11 est simplement altéré en surface par l’action conjuguée des vents et de l'attraction lunaire. Au large, le courant froid des eaux profondes remonte vers la surface à la hauteur de la plateforme continentale. La nature est un pourvoyeur d'énergie de premier ordre.
Yoran traça deux flèches sur le fond plat de la mer, l’une en face de l'autre.
La terre aussi, elle travaille, il n’y a pas que l’eau. L’écorce terrestre subit des altérations continuelles. Les plaques tectoniques se séparent, s’affrontent, se déchirent ou se tordent. Parfois, des failles apparaissent dans des endroits fragiles ou dans les zones de rupture, et le magma crève la surface, avec une déperdition inestimable d’énergie en éruptions volcaniques ou en coulées de lave, ce qui ne représente qu'une infime partie de l’énergie contenue dans le noyau terrestre.
Posant son crayon à dessin sur sa tablette, il se tourna vers ses invités et poursuivit sans s’adresser à personne en particulier.
Quand nous avons commencé nos travaux d’approche, il y a de ça plus de vingt ans, j’ai volontairement placé la barre très haute. Le but que nous nous étions fixé était de récupérer une infime fraction de cette énergie inutilement gaspillée, la domestiquer en quelque sorte, et l’utiliser dans le but le plus noble qui soit.
Cheik Yoran vint auprès de sa petite fille d’un pas fatigué et s'assit à ses côtés. Les paupières lourdes, il lui caressa la main et secoua la tête comme s'il essayait de s’arracher à une emprise obsédante.
Nous avons beaucoup peiné, mais nous avons abouti. Nos équipes travaillant dans le Nid et celles dirigées par le père d'Irbit et disséminées en Europe et en Amérique ont réussi à trouver le moyen de domestiquer une minuscule partie de cette énergie. Et maintenant, grâce à la formule mathématique contenue dans le Message, nous allons procéder à notre premier test grandeur nature.
Irbit déposa un timide baiser sur la joue ridée de son grand- père et serra très fort sa main dans les siennes. Ses traits s’animèrent d’une force et d'une maturité insoupçonnées chez une personne de son âge. Le menton fièrement relevé, elle répliqua d’une voix empreinte de conviction :
C’est fini, grand-père ! Notre errance est finie maintenant ! Je suis là près de toi. Il n’y a que ça qui compte !
Cheik Yoran, tournant la tête vers un angle imprécis de la pièce, ajouta sur le ton de celui qui voit enfin se matérialiser son rêve :
Il n'est que temps de livrer cette énergie au monde. Des plaines arides de l’Arabie coulera bientôt une rivière qui fera fleurir le désert et embaumera la terre. Et cette marée miraculeuse déversera ses bienfaits au nord, au sud, à l’est et à l'ouest. Elle
transformera en paradis les contrées les plus miséreuses de notre planète...
Pendant que Cheik Yoran accompagnait ie professeur Keifer pour une visite des laboratoires, Liam et Irbit avaient été invités à faire une sortie en plongée dans les eaux de la mer Rouge.
Le vestiaire était une pièce de couleur ocre, toute en longueur et basse de plafond, avec des casiers munis d'un simple loquet rangés sur deux côtés. Dans un angle, une machine à café était posée sur un meuble haut, près d'une étagère contenant des livres et des revues techniques.
Des détecteurs de chaleur décelant toute présence humaine avaient remplacé avantageusement les interrupteurs. La porte, comme toutes celles donnant accès aux installations considérées sensibles, était munie d'un lecteur d’empreintes digitales et d’un analyseur de voix. L’air avait un léger relent métallique rappelant l’hélium, mais on s’y habituait au bout de quelques minutes.
Irbit sortit d'un placard deux combinaisons de plongée emballées dans des petits sachets. Le tissu arachnéen, chaud au toucher, réfléchissait la lumière sans être tout à fait phosphorescent. Liam essaya de déformer le tissu en tirant sur une manche, mais l'étoffe revenait invariablement à la position initiale.
Le plus naturellement du monde, Irbit lui tourna le dos et commença à dégrafer son survêtement, nullement gênée par cette promiscuité.
Liam entr’aperçut sa peau brune entourée de dentelle blanche, et sentit un frisson courir le long de son dos. 11 secoua la tête et se dit que le séjour d’Irbit en Suède ou en Finlande avait influencé son comportement autant que son passage aux States.
D’après les “longues oreilles” de mon grand-père, fit-elle sans se retourner, tu as appris tes rudiments de plongée pendant que tu faisais tes études d'archéologie en Irlande. Ensuite, tu as perfectionné tes connaissances dans le campus de l’université de Chicago, et plus tard au sein des U.S. Divers, où tu as été invité à suivre un stage. Est-ce que ces renseignements sont exacts ?
Cela remonte à plus loin, ironisa Liam pendant qu'il enfilait sa combinaison en se déhanchant. Quand j’étais tout petit,
j’aimais déjà me plonger dans mon bain ! Bon. soyons sérieux. Ton informateur ne t'a pas menti. J'ai toujours ét

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ɠvotre confiance, et je vous en remercie. Mais dans quel but précis avez-vous bâti cet extraordinaire réseau de galeries et ses annexes ?
A sa vive surprise, ce fut le professeur Keifer qui lui répondit en posant sur son bras une main familière.
Je pense ne pas me tromper en te disant que si Cheik Yoran a établi ses quartiers à plusieurs dizaines de mètres sous terre, c’est parce qu’il détient un secret qu'il ne peut pas divulguer, tout au moins pour l’instant. Et. vu l’importance des moyens qu’il y a déployés, je serais prêt à jurer que ce “trésor” qu’il cache n'est pas celui que tu imagines.
Liam réfléchit quelques secondes, parce que cette réponse ouvrait des perspectives intéressantes. Il comprenait que la notion de “Trésor” s’appliquait ici à quelque chose d'inhabituel, de mystérieux; le professeur Keifer et Cheik Yoran avaient en outre une façon de se regarder qui le déroutait. C’était une sorte de complicité dont l’origine lui demeurait inexpliquée.
Le maître des lieux prit la parole pour mettre un terme à ses doutes. Un certain amusement brillait dans ses yeux.
Le professeur Keifer a raison, et sa déduction est pleine de sagesse. Si nous sommes enterrés justement ici et pas ailleurs, si la vie de ma chère Irbit a été menacée depuis le jour de sa naissance il y a dix-huit ans, si des groupuscules terroristes nous ont attaqués avec une telle violence et si d'autres se préparent à le faire avec une détermination accrue, tous ces malheurs découlent d’une seule et unique raison : nous détenons un secret, je dirais mieux, avec le concours et le sacrifice de mon fils et ses équipes de scientifiques nous avons fait une telle découverte que le mot “trésor” employé par le professeur Keifer la décrit à peine et aussi, la banalise.
Cheik Yoran se tourna vers Liam, qui écoutait attentivement ces propos, et poursuivit en s’adressant à lui en particulier :
Si vous vous donnez la peine d'analyser les éléments que vous connaissez du problème, vous devriez pouvoir formuler quelques hypothèses.
Liam acquiesça de la tête, curieux de savoir par quel chemin le vieil homme voulait le conduire. L’intensité du regard d'Irbit l’encouragea dans ce sens.
Pensez-vous qu’un homme de mon âge, qui bénéficie depuis des générations d’une solide situation financière et d'un rang élevé dans la hiérarchie saoudienne puisse tout compromettre, y compris sa vie ainsi que celle de sa famille, sans un motif
vraiment impérieux ?
Evidemment pas, confirma Liam.
Alors, si je ne suis pas motivé par la cupidité ou par la recherche d’une gloire éphémère, de quel genre doit être cette découverte que nous tenons tant à garder secrète ? Concentrez- vous sur les particularités de cette région du monde et sur les problèmes endémiques qui l'accablent comme une malédiction depuis l’aube de son histoire.
Liam essaya de faire la synthèse de ses connaissances, mais résumer instantanément quatre ou cinq mille années tenait de la gageure. Le berceau des trois grandes religions monothéistes avait connu un destin particulièrement marqué par les conflits engendrés au nom d’Amon-Ra, de Yhavé, de Jésus-Christ, ou les tueries que l'on a commises et que l'on commet au nom d'Allah.
L’ancien grenier à blé de l'Empire Romain, les pâturages et les forêts verdoyantes du Liban ou les plaines fertiles du nord du Maghreb, actuellement en friche et desséchées, ne lui faisaient pas oublier que l'imaginaire local foisonnait d’exemples similaires au mythe du pays de Canaan, “où le lait et le miel coulent à flots”.
Liam opta pour un compromis prudent.
Nous devons admettre d'abord que la pauvreté du sol et la rigueur climatique de cette partie du monde ont conditionné le comportement des populations qui la composent, dit Liam en cherchant, et trouvant, dans les yeux de Yoran un signe quelconque qui l’encouragerait à poursuivre.
Continuez, n’ayez pas peur. Nous avançons dans le bon sens, dit Yoran avec un assentiment de la tête.
Donc, vos travaux doivent avoir un rapport avec la création et la répartition équitable des richesses.
Le sourire qui éclaira le visage d'Irbit fut pour Liam la meilleure des récompenses.
Bravo, jeune homme ! Nous approchons du but. Sans précipitation et avec méthode, comme cela doit être fait. Passons à la question suivante, qui découle logiquement de la première : par quel sorte de miracle pourrait-on éradiquer à jamais la pauvreté de cette terre ?
Cette fois-ci, Liam n'eut aucun mal à trouver une réponse
appropriée. Depuis le professeur Keifer jusqu'au plus humble terrassier ayant participé aux fouilles, tous les membres de l’équipe avaient peiné des semaines durant sous un soleil implacable. Le décor était terriblement beau, mais apocalyptique.
Si j’avais le pouvoir de changer tant soit peu les choses, je commencerais par amener de l'eau, répondit Liam d'un ton assuré.
Cheik Yoran ne sembla pas satisfait par ses paroles.
Admettons, dit-il avec une moue hésitative, mais pensez toujours aux symboles... Cette eau dont vous parlez, elle représente quoi avant tout ?
La résurgence de la vie ! répliqua Liam avec conviction.
Comme il s’était rendu compte que le raisonnement de
Liam s’éloignait du chemin voulu, le professeur Keifer décida de voler de nouveau à son secours.
La question n'est pas là, Liam. Nous savons tous que l’eau conditionne et précède l’apparition de toute vie. Mais pour quelle raison ? Que contient-elle de si précieux ?
Le jeune archéologue s’imagina un torrent fougueux dévalant les pentes d'une montagne où la végétation rayonnait après une journée de forte pluie. L’eau du torrent s’ouvrait un passage en force, déplaçant de menus rochers et creusant un profond sillon dans la terre meuble. En grossissant, le débit transformait le torrent en rivière, puis en fleuve. Aucun obstacle ne résistait à l’impétuosité des Ilots. Déracinés, des arbres tombaient dans l'eau, éclaboussant les rives. La réponse à la question posée par Yoran apparut alors clairement dans l’esprit de Liam.
Avant tout, l’eau représente un formidable potentiel d’énergie.
Cette fois-ci, l’expression satisfaite de tous les visages, en particulier dans celui d’Irbit, lui fit comprendre qu’il avait vu juste. Cheik Yoran se mit debout et fit deux pas vers l’écran.
Exactement ! Nos générateurs expérimentaux se trouvent dans ce niveau, dit-il en montrant du doigt le deuxième étage du complexe, celui qui était dessiné en orange. Je peux vous dire maintenant, puisqu’Irbit vient d'atteindre ses dix-huit ans et qu'elle a délivré le Message, que la source d’énergie que nous avons réussi à mettre au point représente une merveilleuse espérance de paix, de fertilité et d’abondance. Et cette énergie nouvelle ressemble par bien des traits à la pierre philosophale !
Paradoxalement, les invités de Yoran accueillirent ces paroles sans aucune manifestation d’enthousiasme, parce que la réponse du Cheik ouvrait trop de nouvelles interrogations. La péninsule d'Arabie détenait déjà le plus vaste potentiel d’énergie au monde, sous forme de pétrole. Le professeur Keifer fut le premier à réagir.
Si je prends vos propos à la lettre, et en tenant compte des particularités de l’endroit où nous nous trouvons, c’est-à-dire dans une falaise qui s’enfonce à plus de quatre-vingt mètres sous la mer, vous avez réussi à obtenir de l’énergie à partir de la terre et de l’eau, c’est ça ?
Yoran confirma avec un hochement de tête.
A peu près. Le raccourci est acceptable.
Sainte Mère de Dieu ! s’exclama Liam, qui commençait à comprendre la portée de la découverte. Si vous avez mis au point une telle source d’énergie, les changements, je devrais dire plutôt les bou

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ux était émouvante.
Les fenêtres sculptées et pourvues de vitraux transparents de style gothique rayonnant ouvraient sur les profondeurs d’une mer éternellement changeante. Des poissons multicolores frôlaient en bancs serrés les vitraux ou dévoraient le plancton qui s’accrochait au corail de la paroi extérieure de la salle. Parfois, un poisson plus hardi que les autres semblait regarder vers l’intérieur de la nef centrale, se maintenant dans une immobilité presque totale à l’aide de ses nageoires caudales.
La “salle de réunion” était divisée en plusieurs surfaces d’inégale importance, séparées par des colonnes richement ornées de feuilles d’acanthe : la nef principale, au centre, deux nefs latérales plus petites et plus étroites, et des modules en forme de box à l’emplacement usuel de l'autel. C’était par ailleurs le premier signe tangible permettant au visiteur de comprendre qu'il ne se trouvait pas à l'intérieur d’un temple.
Yoran conduisit ses visiteurs vers le fond de la nef latérale située à gauche de l’entrée. Près du mur de sel gemme, une surface d’une quarantaine de mètres carrés, toute en longueur, avait été aménagée en salle de projections. Des canapés confortables et des tables basses étaient orientés face à un écran de bonne taille. Le vieil homme fit signe à ses invités de s’asseoir, s'installa lui-même sur un fauteuil dont l’accoudoir était pourvu d’une télécommande et rompit le silence de sa voix toujours lente et grave.
- Les images que vous allez voir, mieux que des mots, vous aideront à comprendre où vous vous trouvez, quels secteurs sont ouverts à votre curiosité, ceux qui vous sont formellement
interdits et, surtout, la raison du secret qui entoure ce complexe.
Il appuya sur sa télécommande et un dessin géométrique en forme d'étoile à huit branches apparut à l’écran. Le noyau central, clignotant, avait un diamètre assez important par rapport aux branches.
Comme vous pouvez le constater, poursuivit Yoran en pointant sur le noyau un fin rayon de lumière, la salle de réunion où nous nous trouvons actuellement a été creusée au centre géographique du complexe. Chaque bras qui part de ce centre a une fonction bien déterminée. Certains communiquent entre eux, mais pas tous. Vous trouverez à chaque embranchement un plan d’évacuation qui vous permettra de vous orienter le cas échéant.
Yoran pointa le rayon lumineux vers la branche la plus septentrionale de l’étoile et suivit le tracé de long en large.
Les chambres de nos collaborateurs occasionnels ou de nos invités, comme c’est le cas pour vous aujourd'hui, se trouvent des deux côtés de cet axe.
"Ici, dit-il en indiquant la galerie suivante, vous disposez d’une salle de détente, d'un réfectoire et d’un gymnase, qui sont à votre disposition dans la partie centrale.” Yoran dirigea
sa lampe vers les troisième et quatrième galeries et poursuivit :
Nous avons disposé ici les entrepôts de marchandises et le terminal de charge. L’accès vous est permis, à condition de vous plier au contrôle régulier des plaques d'identification que les gardes vous ont remis en arrivant hier soir au complexe. Elles ne sont activées, pour chacun de vous, que pour les secteurs dans lesquels vous avez été autorisés à pénétrer.
Cheik Yoran se tourna vers ses invités et appuya ses mots d'un regard empreint d’autorité. Liam comprit aussitôt que si le complexe avait résisté depuis si longtemps aux recherches des groupuscules opérant à la surface, c’est que les mesures de protection en place avaient largement prouvé leur efficacité. Et le maître des lieux tenait à ce que cela se sache.
Les cinquième, sixième et septième galeries vous sont formellement interdites. De toutes façons, vos badges n'ont pas été programmés pour vous en permettre l'accès. Je suis persuadé que vous observerez ces règles élémentaires, mais je me devais de vous
prévenir.
Pouvez-vous nous dire au moins quel est le rôle de ces galeries qui nous sont interdites ? demanda le Professeur Keifer.
Elles abritent nos laboratoires. Les techniciens qui y travaillent sont soumis à de contrôles d'hygiène et de sécurité particulièrement stricts. Mais oubliez ces galeries. A l'heure actuelle, la plupart sont désaffectées, car nos recherches viennent à peine d’aboutir. Les corrections, les mises au point de notre système et les adaptations aux nouvelles données ne nécessitent pas un personnel nombreux. Notre succès réside dans la qualité du travail fourni. Passons donc à la huitième branche, si vous le voulez bien.
Cheik Yoran balaya la galerie sur toute sa longueur avec son pinceau lumineux, insistant particulièrement sur la partie la plus éloignée du noyau central.
L’ascenseur qui communiquait avec le poste de contrôle attaqué hier après-midi par ce groupe terroriste débouchait exactement ici. Le poste a été détruit par une charge explosive, comme vous devez déjà le savoir. Par conséquent, cette sortie ne conduit plus nulle part, mais la galerie n'a pas été abandonnée. Elle héberge les locaux occupés par nos forces de sécurité. L’accès ne vous en est pas interdit, mais je pense que vous trouverez des endroits beaucoup plus intéressants à visiter.
Une patrouille composée de quatre hommes traversa la nef centrale et passa à proximité de la salle de conférences. Leur allure était décontractée, et le regard des visiteurs ne surprit aucune attitude martiale ni vaguement méfiante. Ils ne portaient pas d’autre arme visible qu’une ceinture avec un petit boîtier noir de chaque côté de la taille.
Quand Liam détourna les yeux de la patrouille qui s’éloignait en direction de la sortie de la salle, son regard rencontra celui de Cheik Yoran. Le vieil homme le fixait avec une expression amusée. Il parut s’en contenter et appuya une nouvelle fois sur sa télécommande. Le croquis de l’écran disparut aussitôt, remplacé par une coupe verticale représentant les divers niveaux des installations.
D’après ce nouveau plan, le complexe était divisé en trois étages, tous de la même taille et pareillement dotés d’un noyau central et de ses huit branches. Dans ce graphique, chaque niveau était dessiné d'une couleur différente. Ainsi, le premier était en bleu, le deuxième en orange et le troisième en vert. Comme un point lumineux clignotait dans le noyau le plus élevé, ils conclurent que la salle de conférences se trouvait au troisième étage.
Yoran parcourut avec sa lampe la colonne cylindrique qui servait d'épine dorsale au complexe et balaya chaque niveau de haut en bas, s’arrêtant aux intersections pour expliquer la fonction de l’étage désigné.
Vous connaissez maintenant le rôle du niveau supérieur, représenté en bleu dans dans le plan que vous avez à l’écran. L’étage suivant, en orange, contient exclusivement nos générateurs d'énergie et les ateliers de réparation indispensables. L’accès vous en est interdit pour le moment, mais je vous promets de vous y conduire en temps utile.
“L’étage en vert, le dernier, contient nos laboratoires de cultures hydroponiques et les hangars de nos véhicules, terrestres, marins et sous-marins. Je vous préviens tout de suite que vos badges d’identification ne sont pas codés pour faire fonctionner ces véhicules.
Cheik Yoran éteignit sa lampe et se tourna vers ses invités.
Bien, maintenant que vous avez une vue d’ensemble de nos installations, je suis prêt à répondre à vos questions.
Personnellement j’en ai quelques unes à vous poser, fit Liam avec une impatience qu'Irbit désapprouva d'un froncement de sourcils.
Essayez toujours, jeune homme.
Quand Liam posa ses questions, le ton de sa voix était plus
affable.
En nous montrant l’agencement de vos installations, vous nous avez témoign

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caractère. Les rapports des jeunes filles américaines avec les garçons étaient dépourvus de complexes.
Comme il n’y avait pas d'autre siège que celui dans lequel avait pris place Irbit, Liam s'assit sur le bord de son lit. face au hublot par où la lumière fantomatique de la mer pénétrait dans la pièce.
Ce endroit est vraiment extraordinaire, dit-il en se tournant face à la mer omniprésente. En quittant le poste de contrôle hier soir, nous avons été conduits par des hommes de
votre grand-père sur une plateforme qui s’est enfoncée sous nos pieds à grande vitesse. Après une descente interminable, nous sommes arrivés à une sorte de corps de garde où donnaient plusieurs portes d’acier hermétiquement closes. J’ai été conduit directement ici, et je suis encore sous le charme...
Mon grand-père appelle cet endroit “le Nid du Sphinx”, mais il préfère dire simplement “le Nid”, expliqua-t-elle en regardant dans la même direction que lui. En vérité, je connais le Nid à peine. Nous avons fait ensemble un petit tour d'orientation pour me familiariser avec le complexe. On a marché une heure durant, peut-être plus, montant et descendant des marches à travers des couloirs sans nombre, certains pas plus larges que de simples boyaux. Le Nid s’étale sur une surface considérable.
Le réseau sous-terrain que votre grand-père avait fait creuser en dessous de la chambre du trésor du roi Amoshé était déjà assez impressionnant.
Ne comparez pas ce qui n’est pas comparable, Liam, répondit-elle avec un léger sourire. Là-haut, sous le tombeau d’Amoshé, les installations techniques, les entrepôts, les postes de garde et les tunnels d’accès étaient inutilisés depuis longtemps. Ils n’ont servi au début que pour parfaire la construction du Nid. De toutes façons, ces installations ont disparu à présent sous plusieurs milliers de tonnes de rochers et de sable, parce que la voûte de la galerie était minée. Je crains fort que nos agresseurs ne soient enterrés à l'heure actuelle dans un tombeau inaccessible.
Liam se tut un instant, étourdi par cette violence qu’ils côtoyaient au quotidien depuis le début des fouilles. Elle s'était installée insidieusement dans le campement comme un mal sournois, indissociable de leurs progrès. A chaque nouvelle découverte correspondait son lot de sang.
Vous réagissez face à la mort avec une indifférence surprenante pour votre âge. dit-il en secouant la tête.
Que savez vous de la violence, Liam, répondit-elle d’une voix ferme. A part des images télé, vous ne connaissez que les coups reçus dans un match de football ou les bagarres du samedi soir pour le sourire d'une femme !
La jeune fille remua faiblement puis ajouta sur un ton plus
bas, non exempt d’amertume :
- Vous ne savez rien de ma vie. Liam... rien ! Les nuits d’angoisse que j’ai connues après la disparition de ma mère, la peur quotidienne du kidnapping, du chantage, les alertes de toutes sortes... Non, vous n’avez pas le droit de méjuger.
Liam se leva et s’approcha d’un pas indécis du fauteuil d’Irbit, essayant de retenir ce regard maintenant devenu fuyant et qui exprimait tant de détresse. Il ne s’était jamais senti si fort, si sûr de lui, ni n’avait éprouvé ce besoin quasi-physique de protéger quelqu’un et de lui insuffler un peu de cette assurance. Après une vague hésitation, il frôla la main de la jeune fille du bout des doigts. Un frisson parcourut aussitôt son bras et se répandit dans tout son corps comme une décharge électrique.
Irbit avait fermé les yeux, et son souffle s’était accéléré. Une force la submergeait et la poussait toujours plus loin. Elle ne réfléchissait pas, ne jugeait plus, ne savait même pas qu'elle était incapable de saisir l’événement. Quand la main de Liam affermie par les travaux des fouilles caressa sa joue puis s’aventura derrière son oreille, dans sa nuque et empoigna enfin avec une certaine brusquerie la masse touffue de sa chevelure, Irbit se sentit gagnée par une tension qui s’empara de tout son corps. Elle rejeta la tête en arrière et sa bouche s’ouvrit comme en quête d’air.
Liam s’agenouilla près d’elle, la fixa longuement, lui sourit et frôla ses lèvres avec le bout de ses doigts. Une vague de fond montant inexorablement des profondeurs de son âme envahit Irbit. Avec un petit cri de détresse, elle se serra contre lui et sentit son corps ferme contre le sien, ses bras puissants la soulever et sa bouche se coller avidement à la sienne.
Lorsqu’elle ouvrit les yeux, il l'embrassa à nouveau. Elle se laissa aller debout tout contre lui, confiante, les yeux mi-clos et le cou tendu, cherchant et fuyant la caresse. Elle passa enfin ses bras autour de ses hanches.
Liam abandonna sa bouche comme à regret et épousa la courbe délicieuse de l’oreille. Il enfouit quelques instants son visage dans la cascade de ses cheveux et remonta jusqu’au creux de l’épaule. Irbit tressaillit, sentant la chaleur de son souffle dans le cou. II couvrit alors sa gorge de baisers passionnés et leurs bouches
se retrouvèrent d'instinct.
Il l’embrassa encore et encore très lentement, comme s’il attendait qu’elle ait pris conscience de la réalité de leurs corps serrés. Il patienta encore, déposant des baisers suaves avec une lenteur calculée à la base de son cou ou dans le creux de sa gorge.
Quand il la sentit prête à oublier le carcan de son éducation et le danger permanent qui tendait ses nerfs comme les cordes d'un arc, il caressa les formes suaves de son corps, s’attardant sur la rondeur d'un sein ou sur l’amphore arrondie de ses hanches.
Irbit avait oublié où elle se trouvait. Elle attendait, immobile, le dos secoué de frissons. Les lèvres entrouvertes, elle s’offrait à lui, son corps impatient de s’éveiller aux délices de l'amour. Elle avait l’impression d'avoir attendu toute sa vie pour donner à cet homme ce qu'elle ne connaissait pas encore mais que ses sens devinaient.
Liam prit une de ses mains et la porta à sa bouche. Il l'embrassa avec fougue sur les yeux, dans le cou, descendit à la naissance de ses seins et enfouit sa langue dans la chaleur de cette vallée prometteuse. Les jambes d’Irbit la portaient à peine, et elle se sentit soulagée quand Liam la déposa avec infiniment de douceur sur le drap satiné de son lit.
- Liam, murmura-t-elle... Je n’ai... Jamais...
Et pendant un temps qui lui parut une éternité, pour la première fois de sa vie, Irbit s’abandonna corps et âme.
Longtemps plus tard, ils rejoignirent cheik Yoran et le professeur Keifer pour un tour de familiarisation du complexe.
La visite débuta par ce que Yoran appela modestement “la salle de réunion”. Elle se trouvait à i’extrémité du tunnel qui conduisait aux chambre attribuées au personnel technique.
Quand ils franchirent la porte étanche qui donnait accès à la pièce, la question que le professeur Keifer avait l’intention de poser à Yoran à propos du sort qu'il leur avait réservé demeura en suspens sur ses lèvres. Plus qu'interdit par le spectacle qui s’offrait à ses yeux, son regard exprima d'abord l'étonnement, ensuite l'admiration, et se figea à la fin, béat. La “salle de réunion" avait été creusée dans un gisement de sel gemme. Les voûtes ogivales du plafond s’élevaient avec la grâce et l’élégance d’une cathédrale, trois fois plus longue que large, pouvant accueillir aisément deux centaines de personnes.
Sous l'éclairage bleuté des lampes, le minerai devenait iridescent. La lumière, multipliée à l'infini par les facettes du sel gemme, conférait à l'atmosphère une ampleur irréelle. Le silence enveloppa le professeur Keifer dès qu'il eut franchi la voûte d’inspiration gothique de l’entrée. Loin de peser ou d'opprimer, la sensation qu’il éprouva en pénétrant dans les lie

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rendre des initiatives, mais jamais de cet ordre. D'ordinaire, ce genre de problème était traité dans le cadre des Nations Unies ou tout au moins en étroite concertation entre les grandes puissances. Le Commandant du Severodvinsk avait besoin de certitudes, car s'il acceptait de poursuivre, il serait peut-être forcé de commettre un acte de guerre contre le bâtiment d’un pays neutre. Pour compliquer le tout, Arkady avait tout lieu de penser que Vania et ses hommes étaient membres d’un commando Alpha. Et l’équipage du sous-marin connaissait maintenant leurs visages.
Si vous voulez que je vous épaule autrement qu’en jouant le taxi, il faudra m’expliquer pourquoi nos supérieurs ont pris, seuls, le risque d’intervenir.
Le chef du commando appliqua une serviette en papier sur son visage. Il s’essuya méticuleusement le front et, décidé à tirer parti de la situation, se mit à parler rapidement. Arkady ne le quittait pas des yeux.
Si notre pays tient tant à faire disparaître la menace d’une explosion atomique arabe sans le concours des Nations Unies ni de tout autre organisme, j’imagine que les raisons doivent être nombreuses. Souvenez-vous que nos anciens dirigeants ont procédé à des discrets transferts de technologie envers certains pays considérés à l’époque comme des alliés sûrs.
Arkady fit une moue plus que dubitative.
Vous ne pouvez pas comprendre...
Oh que si, je comprends, et comment ! répondit Arkady avec un haussement de sourcils.
Non, vous ne comprenez pas. Il n’est pas question d’analyser les décisions de ceux qui nous ont précédés, ni encore moins de porter un jugement de valeur à ce sujet. Sachez seulement que, si cette menace plane aujourd’hui au dessus de nos têtes, nous, les héritiers des soviets, nous sommes en partie responsables.
Donc, ce que vous proposez...
Vania ne lui donna pas l’occasion de terminer sa phrase.
- Ce n’est ni plus ni moins que de laver en famille notre linge sale.
Malgré les moments d'inquiétude qu’ils avaient connu la veille, Liam Tara se réveilla avec l’agréable sensation de poursuivre un rêve. Les couleurs qui l’entouraient, les odeurs, la température de la pièce ainsi que l’absence d’humidité tendaient à mélanger dans son esprit l’imaginaire et la réalité.
Comme il se sentait étrangement détendu, il étira les jambes en les écartant pour prendre possession de toute la place disponible dans son lit. Le mince drap bleu clair ne pesait nullement sur ses membres, paraissant tissé dans une matière ayant la légèreté d’un voile. Liam huma plusieurs fois l’air ambiant. C’était un air délicieusement frais, mais avec un léger arrière-goût métallique.
La chambre qui lui avait été attribuée était presque aussi longue que large. Sa forme ne lui apprit rien de nouveau sur l'endroit où ils avaient été conduits. Les murs étaient d’un vert apaisant de teinte pastel, et d’une apparence satinée qui accentuait sa sensation de bien-être.
Une console vidéo et un terminal d’ordinateur reliés au réseau général étaient disposés dans un petit meuble marqueté en bois de rose. Ils s’intégraient sans surprendre dans ce décor un peu surréaliste.
Le jeune archéologue aventura un regard par-dessus son épaule en direction du côté gauche de la pièce. Cette fois-ci, il prit la précaution de retenir sa respiration, mais le choc qu'il éprouva le saisit avec une intensité nullement atténuée par son expérience de la veille. Son corps tout entier tressaillit, saisi par la même fièvre qu'il avait connue le jour où. adolescent, il avait pris dans sa main, puis caressé, le sein ferme et doré d'une jeune amie de son âge. Le mot “volupté” affleura ses lèvres. Il le prononça sans pudeur, presque avec du respect.
Liam allongea le bras et frôla du bout des doigts la surface transparente et polie de la vitre en glassite, unique rempart contre la mer, si proche et omniprésente. La paroi était épaisse d’une bonne vingtaine de centimètres. Son oeil enregistra ce détail, puis il fut irrésistiblement attiré vers l’immensité diaphane de la mer- océane.
Comme la lumière du jour n'arrivait qu'à teindre d'un bleu royal les eaux de la plateforme continentale, Liam conclut que sa chambre devait se trouver à une soixantaine de mètres de profondeur au moins. A quelques pas de la paroi de glassite, un escarpement de corail semblait grimper vers la surface.
Au delà de l’escarpement corallien, la plateforme s’étirait à perte de vue, entrecoupée ça et là d'aspérités rocheuses d’origine vraisemblablement volcanique. La flore et la faune étaient d’une richesse et d’une variété inimaginables. A quelques mètres de sa fenêtre, il aperçut une vaste prairie verdoyante et grasse peuplée de poissons de toutes sortes. Au sommet d’un pilier de lave basaltique, le faible courant sous-marin agitait au ralenti les filaments d’une anémone de mer entourée de galathées. Plus loin, sur sa gauche, un banc de céphalopodes se dirigeait avec des convulsions saccadées vers une colonie de lis de mer, dont les bras en éventail ployaient gracieusement de haut en bas. Partout, une vie luxuriante s’était emparée de ce paysage chaotique auquel de nombreuses cheminées hydrothermales maintenant éteintes conféraient l'apparence fantomatique d'un champ de ruines.
Parfois, sous l’effet d'un nuage qui masquait le soleil à la surface, le bleu royal de la mer se transformait en vert émeraude en une fraction de seconde. Un rayon de lumière s’accrochait alors à des particules invisibles qui le réfléchissaient dans plusieurs directions, créant un ballet composé d’une myriade de lucioles. Leur existence éphémère avait quelque chose de poignant.
Deux coups frappés à la porte l'obligèrent à s’arracher à ce passionnant spectacle.
- Entrez, dit-il après avoir quitté le lit en se couvrant avec une robe de chambre.
Sa curiosité se transforma en surprise quand Irbit apparut sur le seuil et pénétra dans sa chambre en refermant derrière elle la porte.
La jeune fille portait une sorte de combinaison blanche trop grande pour elle de deux ou trois tailles, confectionnée dans le même tissu léger que les draps de son lit. La combinaison formait des plis lâches sous ses seins ainsi qu’autour de ses hanches. Irbit avait été même obligée de la retrousser sur ses chevilles pour pouvoir la porter sans traîner les jambes.
Quand elle s’approcha de lui. il y avait quelque chose d’impudique non pas dans sa démarche, mais dans la façon dont le linge plaqué contre son corps épousa ses formes. La trame de l’étoffe était si ténue qu’elle semblait évanescente.
Liam la considéra un instant, encore sous l'effet de la surprise et physiquement troublé par l’odeur musquée qui se dégageait d’elle. L’éclat de ces yeux qui le fixaient avec une ironie non dénuée d’innocence le mit mal à l'aise.
Bonjour, Irbit. Comment se fait-il que votre grand-père vous ait donné la permission de me rendre visite ? dit-il avec une certaine gaucherie.
Puis-je m’asseoir ? demanda-t-elle sans donner l’impression d’avoir entendu ses paroles.
Bien sûr, dit Liam. qui s'empressa de lui offrir un siège.
Irbit s’installa sur le mince fauteuil, croisa ses jambes à la
garçonne et appuya son menton contre la paume de sa main. Elle jaugea le jeune archéologue sans complaisance, nullement intimidée, s’amusant de Létonnement qui s’était peint sur son visage.
Liam, qui se tenait debout à proximité, préféra attendre avant de l’interroger. Son attitude désinvolte ne le choquait pas, mais elle ne cadrait tout simplement pas avec l'idée qu'il se faisait de la femme en pays arabe. Il se souvint aussitôt qu'Irbit avait passé toute sa jeunesse en Occident, et que ses séjours aux Etats- Unis avaient évidemment marqué son

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ation, notre marge est trop étroite.
"Si la F220 prend la route du Golfe d'Aden pour doubler la corne de l’Afrique, vous n’aurez même pas l’occasion d'intervenir. 11 tombera directement dans nos bras, et si je suis obligé de stopper sa course, je n'aurai d’autre recours que de le torpiller.
En revanche, s’ils se dirigent vers le canal de Suez, nous n’aurons jamais le temps de les rattraper avant qu’ils n’abordent la première écluse. Si nous ratons cette opportunité, croyez-moi, Vania, même pour un homme de terrain comme vous, il serait illusoire d'envisager une quelconque tentative une fois qu’il aura pénétré dans les eaux du canal."
Votre opinion n’est pas particulièrement encourageante, fit Vania sur le même ton posé, mais elle a au moins le mérite de coller à la réalité. Quelle manoeuvre comptez-vous donc adopter ?
A part les questions d'ordre purement matériel qu'il tournait et retournait dans sa tête, Arkady avait déjà conclu que la meilleure option à suivre était de déplacer son sous-marin vers le nord en longeant les côtes de l’Arabie. En restant sur place, ils n’auraient jamais une marge de temps suffisante pour intercepter le patrouilleur s’il prenait le cap vers le canal de Suez.
Arkady pointa son crayon vers un endroit précis de la carte marine et tapota dessus à plusieurs reprises.
Nous allons placer le Severodvinsk dans une route d'interception par rapport au cap éventuel que prendra la F220 en quittant Al-Lith. S'il prend la route du sud, c’est-à-dire en direction du détroit de Bab-al-Mandab, notre vitesse supérieure, même en plongée, nous permettra de prendre de l’avance et de l’attendre dans l’endroit que nous aurons choisi pour le couler à la torpille. Si, en revanche, la corvette amorce un mouvement vers le canal de Suez, nous nous trouverions dans l'impossibilité de tenter une quelconque opération combinée avant qu’il ne gagne la première écluse.
C’est vous le commandant de cette boîte à sardines, répondit Vania en relevant la tête de la carte marine.
Si nous sommes d'accord là-dessus, voilà déjà un premier point d’acquis.
Arkady marqua un silence puis, un instant plus tard, il posa une nouvelle question à son partenaire :
Racontez-moi maintenant pourquoi vous avez quitté Jizan poursuivi par une horde frénétique de musulmans qui brandissaient contre vous toutes sortes d'instruments agricoles ou domestiques. Je parie que cela risque d’être peu banal...
Vania se rembrunit un moment au souvenir du danger permanent dans lequel il avait vécu pendant des jours et des jours. Si la fin de son voyage en Arabie et au Yémen avait été pimentée par une sortie pour le moins peu discrète, il avait couru le risque à chaque instant d’être repéré par la partie adverse et de payer de sa vie sa présence en territoire hostile.
Les hommes de l'une des deux factions arabes répertoriées qui sont à l’origine de ce projet atomique m’ont découvert juste au moment où j'allais quitter le pays, commença Vania d’un air emprunté. Le surlendemain de l’explosion du dépôt de munitions, j'avais pris rendez-vous avec l'un de mes informateurs dans un café face au marché aux poissons de Jizan.
Malgré la somme conséquente que je lui avais promise, personne n'est venu. Si, quatre ou cinq individus aux allures plus qu’inquiétantes ont essayé de couvrir les issues du marché. Leur manoeuvre était trop grossière et je les ai repérés tout de suite. 11 ne me restait plus qu’à tenter de m’esquiver le plus rapidement possible.
Vous parlez de quatre ou cinq hommes... Mais vous étiez poursuivi par une véritable foule ! l'interrompit Arkady, qui ne parvenait pas à croiser son regard fuyant.
C'est au moment de quitter la place que je me suis rendu compte de mon erreur de jugement. Si le mouvement circulaire autour du marché était si manifeste, ce n’était qu'un piège astucieusement calculé.
“Pour être plus précis, ils m’avaient laissé une porte de sortie. Une seule. Je l'ai donc empruntée, puisque je n'avais pas d'autre issue, et je me suis retrouvé dans une impasse encombrée de marchandises de toutes sortes. Comme je m'en suis aperçu un moment plus tard, c’était un cul-de-sac fermé à gauche par le mur d’une mosquée. Un mur de plus de deux mètres construit avec des briques peintes à la chaux.”
Comment avez-vous fait pour vous sortir de là ?
En sautant par dessus le mur à l’aide d’un étalage de pastèques que j’ai été obligé de renverser. Je suis tombé en plein dans la cour principale de la mosquée. 11 était cinq heures de l'après-midi, l’heure de la prière, et la mosquée était bondée...
“Je me suis échappé comme j'ai pu, en écrasant quelques mains et en bousculant pas mal de monde au passage, mais la surprise a été ma meilleure alliée. Après une traversée fulgurante de la cour, j’ai gagné une pièce plus petite. Je me souviens qu’il y avait une fontaine pour les ablutions rituelles. Bien entendu, j’ai quitté la mosquée le plus vite que j’ai pu.”
J'imagine aisément le spectacle... fit Arkady en esquissant un sourire. Sans le savoir, vous aviez choisi le moyen idéal pour déclencher une émeute : fouler le sol sacré d'une mosquée chaussé avec vos godillots en interrompant la prière du vendredi !
Dehors, poursuivit Vania en se massant la nuque, les murs blanchis des maisons disposées autour de la place réfléchissaient un soleil si aveuglant que j’ai été obligé de fermer les yeux le temps de m’accoutumer. J’ai quitté la place en longeant les habitations sur une bonne centaine de mètres, puis je me suis engouffré dans la première ruelle qui descendait vers la mer.
V
“Comme je voulais mettre le maximum de distance entre les fidèles de la mosquée et moi, je marchais d'un bon pas, mais j’avais cessé de courir pour ne pas alerter inutilement les badauds. Le cri de rage qui retentit dans mon dos à une distance beaucoup trop rapprochée me fit perdre toute retenue. Attirés par les appels vindicatifs que lançaient mes poursuivants outragés, des gens commençaient à sortir de partout, hommes, femmes, enfants et vieillards. Des pierres, des bâtons, des fourches ou des couteaux avaient fleuri dans leurs mains comme par enchantement. Et cette foule hurlante, cette masse compacte et déchaînée, s’est ruée à ma poursuite, les plus forts poussant les faibles pour m’atteindre les premiers.
Pour quelqu’un qui est censé avoir l’habitude de se fondre dans le paysage, vous n’avez pas laissé que des amis à Jizan, dit Arkady avec une pointe d’ironie.
Vania continua son histoire comme s’il n’avait pas entendu la remarque.
J'ai couru de toutes mes forces en direction du port. Mon correspondant local devait m’attendre comme convenu au bout de la jetée. Heureusement, il a vu venir la foule de loin. Surtout, il l'a entendue aussi. Le moteur du canot tournait déjà quand je suis arrivé jusqu’à lui. La suite vous la connaissez déjà...
Vous avez eu beaucoup de chance, dit Arkady en hochant
la tête.
Certainement, remarqua Vania d'un ton pensif. En attendant, nous ne connaissons toujours pas la destination de cette maudite corvette. Nous sommes tous dans l’impasse.
Laissez-moi le soin de nous en sortir, dit Arkady d'une voix enjouée. Si je coince ce navire juste avant le détroit de Bab- al-Mandab je le coule, et s’il remonte vers le canal de Suez, nous le filerons au train...
Vania fixa son interlocuteur avec un demi-sourire. Arkady Voronej semblait être un homme compétent et courageux, mais c'était avant tout un officier de carrière formé, même malgré lui, à la dure école de la marine. Et dans ces conditions, “Vania’’ ne pouvait, ne devait en aucun cas tout lui dire...
Arkady se massa les tempes et ferma un instant les yeux. Il était habitué à p