herchait de nodules métalliques à trois cent mètres de profondeur.
Il avait été embauché par les hommes de Cheik Yoran un an plus tôt. Le salaire et la perspective d'une expérience passionnante dans le secret total étaient des arguments très convaincants.
O’Donnel se rendit compte que Liam le regardait avec un soupçon d’amusement. Il était souvent perdu dans ses pensés, et savait qu’il arborait dans ces cas-là un air distrait. Le pilote s’empressa de faire un salut de la tête après une oeillade timide en direction d’Irbit. Comme tout le personnel du complexe, il avait entendu des rumeurs concernant la petite fille de Yoran. Il la trouva très belle, mais remarqua que son front était barré d’un pli soucieux. La vie qu’elle avait menée et son enfance gâchée avaient laissé des traces... O’Donnel haussa les épaules et sourit tristement.
- Avant d’embarquer dans Y Opossum je vais vous donner quelques consignes de sécurité. Ce n’est que de la routine.
Il s'avança vers le sous-marin et montra de l’index la partie immergée.
La fragilité de la coque de Y Opossum n'est qu'apparente. Pour percer la paroi de glassite. il faudrait un choc d'une violence rare. Dans un parcours standard comme celui que nous allons faire, le seul danger potentiel viendrait d'une baisse subite de la pression intérieure. Si cela arrivait, des masques respiratoires tomberaient du plafond, un peu comme dans les avions de ligne. Ils contiennent un mélange d'oxygène et d'hélium adapté pour la respiration à cette profondeur.
Le pilote jeta un coup d'oeil en direction du grutier qui était en train d'enlever le crochet du treuil. Le technicien avait presque terminé.
Notre ennemi principal est l'azote dans le sang. L'Opossum n'est pas équipé de scaphandres autonomes permettant aux passagers d'abandonner le navire. En revanche, la balise de détresse activée, l'équipe de secours du Nid ne tarderait pas à arriver sur les lieux. En cas de baisse brutale de la température, assez peu probable je dois dire. Y Opossum dispose de couvertures chauffantes. Elles se trouvent sous les sièges. Des questions ?
Liam confirma du chef.
Juste une. Monsieur O'Donnel.
Appelez-moi Skinny, l'interrompit le pilote avec un sourire engageant.
Moi c'est Liam. dit-il. Quelle sera la durée de notre petite excursion ?
- Je ne crois pas que nous serons absents plus de deux ou trois heures. Peut-être un peu plus, si ce que j'ai l'intention de vous montrer vous intéresse...
O'Donnel sourit à nouveau.
J'ai cru comprendre que vous étiez archéologue, n’est-ce
pas ?
Liam affirma de la tête et regarda le pilote avec une attention accrue.
Alors venez, ne perdons pas de temps. Les “rampants" ont terminé leur boulot.
O'Donnel se dirigea d'un pas ferme vers la passerelle métallique qui avait été tendue entre Y Opossum et le quai. 11 sauta sur le pont et ouvrit 1 'écoutille de proue en tournant le volant de
sécurité.
Quelques minutes plus tard, quand tout le monde fut installé à bord, le submersible s'enfonça dans l'eau avec un bruit assourdi provenant des turbines.
Les doigts de Skinny O'Donnel volèrent sur les touches pour vérifier la check-list. Quand cela fut fait, il ouvrit ensuite les ballasts. Il était sanglé dans son siège face au tableau de commandes de Y Opossum, les mains posées sur le levier de profondeur et sur le propulseur. Ses pieds reposaient sur les pédales de direction. Des lumières multicolores éclairaient la cabine comme un théâtre de Broadway. Avec ses commandes manuelles, ses pédaliers, ses contrôles et voyants de toutes sortes et son horizon artificiel, le panneau avant ressemblait à celui d’un hélicoptère, mais la similitude s’arrêtait là. Dans les entrailles de VOpossum, l’équipement avait été miniaturisé à l’extrême. L’informatique, les détecteurs sonar actifs et passifs, le système de communications sophistiqué tenant compte de la distorsion des ondes provoquée par l’eau, tous les éléments indispensables à la bonne marche de cette machine en faisaient un exemplaire unique en son genre, d’un coût prohibitif.
O'Donnel actionna le système de guidage laser qui permettait à V Opossum de se déplacer selon le cap prévu. L’ordinateur corrigeait au fur et à mesure la profondeur et la dérive en jouant avec les ballasts. Au bout de quatre ou cinq secondes, une lumière orangée se mit à clignoter sur le tableau de bord. Skinny comprit qu’il se trouvait déjà à moins de dix mètres de la balise de guidage. Il se mit sur conduite automatique et se détendit un instant.
- A toi de jouer, ma belle ! dit-il avec un clin d’oeil complice en direction de l’ordinateur. Moins de deux minutes plus tard, un ronflement à peine perceptible lui apprit que l'Opossum venait de stabiliser ses ballasts.
Avant de lancer la turbine, le pilote suivit machinalement dans l'écouteur la litanie habituelle des contrôles de sécurité effectués par l'ordinateur. Quand tous les témoins lumineux furent au vert, il programma sa destination en introduisant les références avec son clavier. Comme il pouvait choisir la conduite automatique ou manuelle, il hésita une seconde et opta pour garder
la conduite manuelle. Il aurait ainsi la liberté de moduler sa vitesse.
Avant d’actionner la commande de départ, il se tourna vers ses passagers afin de vérifier s’ils étaient correctement installés. Irbit et Liam étaient assis à côté de lui, à la place habituelle du copilote et du navigateur. Mike se trouvait derrière eux, le buste raide et le regard concentré.
Cela étant fait, Skinny mit en route les rampes lumineuses extérieures. Deux rangées de quatre rampes étaient situées au dessus et au dessous du poste de pilotage, ainsi que deux autres de huit lampes courant le long des flancs de Y Opossum.
Comme l'eau du bassin était soumise à des turbulences, les passagers n’apercevaient que le reflet de leurs propres visages collés à la paroi de glassite. Le pilote entama alors la procédure de dégagement .
Contrôle, ici Opossum. Je suis paré pour le largage.
Roger, Opossum. Vous avez le feu vert. Allez-y et bonne promenade ! répondit dans son auriculaire la voix à l’accent australien du responsable du trafic sous-marin.
Avec un frémissement qui agita légèrement l’habitacle, Y Opossum se libéra de l’immobilité. Le guidage laser allait les conduire comme un fil d'Ariane pendant la durée de leur parcours.
La traversée du bassin se déroula en quelques secondes. Ensuite. Y Opossum s’engagea dans un tunnel creusé dans la roche friable. Les parois semblaient dangereusement proches mais, au grand soulagement des passagers, la longueur du tunnel n’excédait pas une vingtaine de mètres. Bientôt, et malgré la profondeur, la lumière du jour inonda l'habitacle faisant disparaître la sensation d'oppression qu'ils avaient éprouvée. Les rampes lumineuses accentuaient cette impression de sécurité retrouvée.
Leur route décrivait une ellipse le long du récif corallien, qui grouillait de vie. Effrayés, des poissons s’écartaient du chemin de Y Opossum avec des mouvements vifs et s’égayaient dans tous les sens. Dans leur précipitation, certains heurtaient le sous-marin puis repartaient en sens contraire d'une nage incertaine. Le submersible s'inclina de quelques degrés pour amorcer un virage et se redressa à la sortie, s’éloignant du récif corallien. Plusieurs centaines de mètres plus loin, l’attention des passagers fut attirée
par d'innombrables fumerolles volcaniques en activité. Beaucoup d’entre elles dégageaient un épais nuage cendré. Des bulles épaisses s’élevaient en tourbillonnant vers la surface. Le fond de la mer était stérile aux alentours.
Après un nouveau virage vers le nord, Y Opossum pénétra dans un vaste champ de possidonies qui prenait naissance au pied d'un nouveau r
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